Petite balade lectouroise sous le regard de célébrités locales et de quelques inconnus.
Publié le 27 Juillet 2021
e ne sais pas vous, autochtone ou bien visiteur d'un jour, en marchant rue Nationale ou dans quelque ruelle dévalant la citadelle, j'ai toujours l'impression qu'on m'observe. Non, je ne veux pas évoquer ces fameuses caméras de surveillance urbaine qui, signe des temps, sont arrivées jusque dans notre petit pays pourtant encore tranquille, comme la 5G sur le chemin de saint-Jacques ou le mur du son d'un bombardier à l'entraînement, résonant effrayant au fond du vallon de saint-Jourdain. Non, je ne dirai rien non plus de la ménagère qui épie le passant en soulevant un coin de son rideau de macramé, ni du commerçant derrière son comptoir qui espère, par-dessus ses lunettes, que le chaland se décidera à enjamber son pas-de-porte. D'ailleurs, ce n'est pas nécessairement désagréable, ce regard quelque peu inquisiteur, qui oblige à se bien tenir, à sourire et à saluer, quelle que soit notre humeur ou notre destination du moment. Autrefois, au moindre regard de rencontre, l'on inclinait la tête, ou l'on soulevait le couvre-chef, c'est-à-dire chez nous le béret, les dames étant dispensées. Finalement, échanger un regard comme échanger un mot, c'est déjà faire un premier geste de civilité.
Mais, certains regards dont je veux vous parler, sculptés dans la pierre, le bois, les matières synthétiques aujourd'hui, peints sur toile, ou imprimés et plastifiés ce sera probablement moins durable, sont peu prégnants et l'on a tendance à ne pas les considérer. A tort. Peut-être parce qu'ils sont posés là, un peu bêtement, sur une façade ou sur un piédestal, ad vitam, sous la pluie et le soleil ardent, et qu'il n'y a aucun espoir d'engager le dialogue. Non, ce n'est pas que décoratif. Il doit bien y avoir quelque chose à en tirer. Qu'a voulu dire l'auteur de cette exhibition gratuite ? Quel est le message ? Il y aura sans doute bien des erreurs d'interprétation. Des refus de collaborer même. Mais déjà, si nos regards se croisent, si, en secret pour ne pas passer pour un fada, on veut bien dire un petit bonjour à ce qui n'est pas tout à fait un objet inanimé, adresser un petit compliment, faites l'expérience, la balade s'en trouvera toute égayée.
Contrairement à ce que l'on prétend parfois, les portes ne sont pas faites pour s'enfermer chez soi, mais bien pour en sortir. Il en va de même des statues. Elles ne sont pas mortes mais nous racontent l'histoire de cette ville, et expriment son caractère. Ce carnet d'alinéas l'a déjà suggéré, trop timidement sans doute, Lectoure s'honorerait à ériger un monument célébrant ses deux plus méritants enfants, Pey de Garros et Jean-François Bladé, qui ont marqué profondément la culture gasconne et porté le nom de leur ville dans les hauts lieux intellectuels. Allez, en attendant un renouveau de la statuaire officielle, je vous emmène. Le Village des brocanteurs est une mine, évidemment c'est tentant. Mais à tous seigneurs, tout honneur, déjà vus mais incontournables, Jean Lannes, qui regarde sans doute vers le soleil d'Austerlitz et notre vaillant jacquet qui s'en retourne tout neuf, guéri et pardonné, vers Le Puy-en-Velay.
Alinéas
CREDITS :
La photo du dieu Oceanus, prise dans le musée Camoreyt, est empruntée à Wikipédia - Morbure (alias Jean-Claude Pertuzé).
Toutes les autres photos : © Michel Salanié
La photo-titre de cette chronique est un cadrage serré de la sculpture monumentale trônant devant le Village des brocanteurs.
Nous aurions pu légender plus en détail ces œuvres, date, artiste, localisation... mais nous voulions simplement vous offrir une petite balade photographique, sans prétention.